Minuit 38. Je reviens du ciné, je suis allé voir ‘American Gangsters’ avec une amie. Excellent film; long mais bon et passionnant.
J’avais éteint mon téléphone (ne sachant pas le mettre en vibreur). D’habitude je le regarde dès la sortie de la salle, donc mon ‘réflexe’ (de consommateur moyen accro aux nouvelles technologies) a été de le rallumer. Mon humeur du (très grand) moment étant ce qu’elle est, je l’ai maintenu dans son état léthargique. Je me suis dit que j’allais le laisser comme ça jusqu’à demain matin (après-midi? soir?) mais … non, je craque dans l’ascenseur.
Là, je rallume le-dit mobile. Il met quelques secondes mais fini par m’annoncer que j’ai un (mini)message. Pas de panique, je sais qui c’est, même pas besoin de regarder. Je rentre chez moi, jette un œil à mon téléphone fixe: confirmation de qui a essayé de me joindre.
Très bien…
Je rassemble les papiers qu’il faut que je photocopie demain et… il manque quelque chose. Je tends l’oreille; ah oui: de la musique. Mon appart’ n’est abrité que par le bruit des ventilos alors que d’habitude il est couvert par de la musique (la musique est tellement constamment présente chez moi qu’elle (me) manque quand je suis chez les autres).
La musique attendra, je fini mes papiers.
Une fois rassemblé le tas à photocopier, je rentre dans le cyberworld: checkage de mails (« merdicum, pas de réponse de machine »), lançage de Pidgin (« re-merdicum, bidule n’est pas connectée), lecture des éventuelles nouvelles nouvelles sur les blogs déjà consultés dans la journée. Il n’est que presque minuit, j’ai donc théoriquement de bon paquets de dizaines de minutes avant que me coucher ne devienne une nécessité absolue (enfin… pour peu qu’être en forme au boulot soit une nécessité absolue…)
Alors je musarde. Je lis des billets que je n’avais pas lu, je lis les news du monde auquel je n’appartiens plus, je check 15000 fois mes mails, je regarde 15000 fois Pidgin pour voir si quelqu’un s’est connecté depuis la dernière demie seconde, je reviens au billet que j’ai laissé 2 secondes plus tôt, au milieu d’une phrase, happée par une envie d’aller voir sur la page d’à côté.
Je lis. Je vois des mots qui s’alignent, forment des phrases. Je suppose, mais ne suis pas très sûr, que ces phrases résonnent dans ma tête, et ont une voix que mon cerveau leur donne.
Mais personne ne parle, dans mon appart’.
Je fini par aller sur sa page. Ça me fait toujours un effet terrible; ça réchauffe, ça brûle, ça remue, ça me donne envie de m’exprimer, ou au moins tenter de le faire, ça blesse, ça me crispe, ça me fait me sentir vivant, après tout, me sentir moi, de faire des choses dingues (qui, après tout, seraient moi, non?).
Je quitte la page. Des millions de choses tournent dans ma tête mais reste muet, fidèle à mon humeur (et à ma décision?) Je voudrais (lui? lui? lui?) écrire ce qui me tourneboule le ciboulot, heurtent d’autres choses, mais je reste bouche close.
Je sens les idées qui veulent se transformer en mots et sortir. J’ai envie de parler mais je décide (j’ai décidé) que non. Pas parler. Pas communiquer. Fini.
Alors … je perçois le silence verbal autour de moi. Je sens tout ce fouillis qui veut sortir mais non, il restera en moi.
Je me sens comme une tour d’ivoire, avec plein de choses à l’intérieur, plein de choses cachées que je ne veux pas donner au monde. Que je devrais donner, que j’ai donné, mais que je ne veux plus donner. Basta… Ça grandira (pourrira?) mais attendra. Et en attendant je reste bouche close.
Elle est connectée. Soulagement… Je clavarde… Je ne parle toujours pas (pas de sons) mais … j’adoooore quand elle est là. Et elle est toujours là, toujours 🙂 On tapote. Pas de sons que celui du clavier, ça sera celui de sa voix. Ses mots s’alignent, calmement. Je pose des questions, elle y répond, calmement. Elle me respecte. Elle ne me violente pas, ne me fait pas chier. Je ne parle toujours pas, je refuse de parler, d’émettre un son, ne serait-ce qu’une exclamation, mais je tapote. Je me sens calme, avec elle. Je la laisse naviguer en moi où elle veut, elle sait le faire, elle ne casse rien et observe avec attention.
Je ne parle toujours pas, mais je lui parle… ça me repose…