La musique de samba est pleine de breaks. La plupart sont prévus et orchestrés, mais certains arrivent inopinément à la suite d’événements plus violents qui vous donnent envie d’envoyer paitre avec une rage inouïe tout ce qui ressemble de près ou de loin à un rythme ou ce qui pourrait en produire un.
Y compris si c’est un humain.
Fête de la musique, notre programme, sur scène, est simple : ce que nous jouions depuis des mois, puis free style. Au moment d’y monter je me fais baiser ma place au surdo. En beauté, comme un bleu, sans pitié, dans le cul la mailloche. Pas de morceau alors que ça fait 4 mois que je le prépare. Censément je pourrai reprendre ma place une fois le morceau passé, pendant le free style mais faut pas rêver : ils sont trop content d’être sur scène, pas de temps mort qui permettrait de prendre un instru, pas de place pour le lapin.
Je fulmine comme rarement, et tout y passe : faire un break définitif avec la batuc, revendre le surdo que j’ai commandé (de toute façon je veux faire du 1, pas du 2), ne pas monter la batuc l’année prochaine, revendre mon billet pour Bayonne, bruler mon pandeiro. Tout le monde y passe également : les surdistes qui ne me laissent pas de place, le prof qui a mal géré la répartition, les potes qui m’ont dit qu’ils venaient et dont l’absence et le silence ont la saveur du mépris, et tous ceux qui sont présents, juste parce qu’ils sont témoins.
Et moi, trop bon trop con qui me laisse baiser ainsi sans rien dire, faisant passer l’intérêt des autres avant le mien au nom de la bateria.
A la fin du show, je vais récupérer mes affaires dans la réserve et vais pour me casser, abandonnant l’idée que K. nous rejoigne, son absence, étrangement, étant la seule chose que j’épargnais du lance-flamme de ma colère, et sa présence une des seules qui pouvait me calmer.
De fait, A. me demande par SMS où je suis. Je lui explique en quelques mots la belle humeur qui m’anime, tentant de ne pas lui faire payer ce qu’elle n’a pas provoquée.
Je fini par partir quand … K. appelle. Elle est avec les batucadistes, me cherchant. K. étant K., je les rejoint. Je retrouve A. et A. au passage, qui tentent de me remonter l’humeur. #fail. Je ne suis pas tendre avec elles …
Je fini tout de même la soirée avec les autres, mais bien loin de partager leur allégresse. Pour moi cette fête de la musique a un goût amer, aussi bien qu’aient pu être les heures avant LEUR montée sur scène. Ce morceau restera pour un paquet de temps synonyme de frustration et de colère, j’ai envie de buter tout ce qui est blanc, j’oublie tous les breaks, je ne supporte plus ce qui fait plus de deux notes de suite en rythme, j’ai envie de tout plaquer et absolument pas d’en parler. Ma colère est dirigée vers deux personnes en particulier, même si je comprends leur motivation, même si c’est ce courroux envers eux est arbitraire, même s’ils n’y sont pas pour grand chose (peut-être).
N. a les mots qui me resteront gravés : ce n’est pas la dernière presta que je ferai, ni la meilleurs, ni la plus kiffante. Et il ne faut pas se cantonner à un instrument. Je m’étais tout de même préparé 4 mois, j’avais bossé, je l’attendais, je piaffais de monter sur scène, merde …
Pour une seule journée, ça commence à faire beaucoup.
Guerre et paix … Comment ai-je pu avoir eu l’outrecuidance de penser qu’il pouvait régner le même esprit dans la batuc qu’en capoeira ? la batuc est une guerre, une compét’ : choix des armes, terrains, batailles, arbitre, coups de pute, alliances, trahisons, intérêts personnels, peu de places sur le podium et un vainqueur, pas deux. La capoeira (so chevere … ) est un apaisement : il y a de la place pour tout le monde, tout le temps, pas de podium, pas d’armes, pas d’arbitre, pas de vainqueur, pas de juge, l’axé ((énergie collective)) prime.
Interprétation libre:
Ah, Ego quand tu me tient, tu es celui en qui je peux avoir le moins confiance !Tu m’a fait croire que je pourrai me mettre en avant, me mettre en scène devant mes potes ,devant les gens, alors que j’aurai pu le faire pour le plaisir d’apprendre et surtout d’être là , présent , avec mes amis du moment ,qui ne le serons plus dans quelque tps, parce que tout change et que tu veux figer chaque chose pour l’éternité pour perpétuer le Plaisir comme une drogue. je suis accros de toi et tu le sais et tu m’en fait baver comme une belle femme qui joue avec moi tel un pantin et je n’arrive pas a divorcer de ce non mariage car tu me cache la perspective de la Vie. Tu joues avec moi à je t’aime moi non plus , tu me fais mal et j’en redemande , je n’ai toujours pas compris ce qui me lie à toi, je ne t’aime pas et je ne peux me passer de toi car tu me promet à chaque fois la lune et j’y crois à chaque fois , quelle manque de foi ai je en mon Cœur, mon seul Amour.
La vrai délivrance serai que l’on devienne Ami ,car nous nous connaissons si bien toi et moi , nous sommes un vieux couple et avons vécu tant de chose que je ne peux te laisser comme une vieille chaussette ce serai faire preuve de manque de Cœur et de compassion. Laissons nous le temps du repos faisons un break ,je te laisse vivre ta vie et tu ne t’occupe plus de moi pendant un moment, comme ça quand nous retrouverons nous aurons tant a partager.De toute façons nous habitons à la même adresse alors prenons du temps chacun pour soi,régulièrement, et nous serons heureux dans notre cohabitation.
A tout de suite mon Ami l’Ego.
Ah ça, je me doutais bien que ça allait te faire réagir 🙂
A posteriori, la réponse est facile, et je l’ai aussi. Mais dans le feu, elle l’est moins. Même si j’avais en tête cette histoire d’égo, pas évident de percer le voile de la colère, de prendre les choses avec légèreté et de s’asseoir sur 4 mois de répèt’ avec philosophie. En 20s j’ai pas eu le temps de me calmer et de prendre un instru pour monter sur scène …
De fait, j’ai tout de même écouté/entendu K. quand elle me disait que ce n’est pas grave (je sais que ce n’est pas grave, mais sur le coup ça l’était), je suis retourné voir les autres et je suis allé à l’after ensuite. Preuve que j’ai foutu mon égo un peu de côté, pour ce coup.
Je suis aussi allé au cours, le vendredi, à la répèt’ le samedi et j’ai toujours envie qu’on forme une batuc l’année prochaine.
Mon égo n’a pas brisé ça.
Quand j’ai fini ce billet j’étais plus calme que ce que le ton laisse penser, mais je ne l’ai pas adouci pour autant : je voulais y laisser la colère 🙂
Aujourd’hui ça va, merci. Je n’ai plus d’urticaire quand j’écoute de la samba 😉 et je me rappel les arrangement de ce que nous devions jouer 😉
Tu avouera quand même que c’est génial d’entendre cette petite voie ,quand tu es frustré, qui te parle en arrière plan, dans le fond de ton esprit, disant : « que fais-tu là, tu t’agites , tu fait du bruit , pour obtenir quoi ? Être reconnu ? Considéré ? De toute les façons c’est fait ! »
J’aime bien être spectateur de mes concepts, j’apprends beaucoup sur ce qui a transformer en moi pour ne plus retomber dans les situations douloureuse.