Lors d’une réincarnation, que reste-t-il de la vie précédente ?
Nos mauvaises habitudes, parait-il. Mais aussi les bonnes, espérons-le.
Bah, en tous cas c’est comme ça que je le vois : changement d’orientation pro, des choses meurent (pourquoi meurent ?) d’autres naissent. Et entre les deux, quoi ?
Entre les deux, quoi ? Qui ?
De l’un à l’autre, qu’est conservé ?
Une sorte de structure. En fait ce que j’ai appris en dehors du boulot.
Faux. Il reste des choses ce que j’ai apprises dans le cadre du boulot : un peu de méthodo, entre autres. Mais je sens déjà tout ça si lointain… Dans une sorte de brouillard duquel il faudrait que je le tire si je veux m’en rappeler. Et cette sensation d’avoir abandonné une grande partie de moi (vraiment ?) et cette question : qui reste ? qui fait le pivot entre les deux ?
Quelle est la signification de ceux qui restent ? J’ai vraiment l’impression d’avoir mis les pieds dans un tout autre monde : mes souvenirs ne sont déjà plus les mêmes, les rues sont différentes, ma vision des choses est différente, mon rapport avec les gens est différent. Au point d’être surpris d’avoir les mêmes amis qu’avant.
Avant…
Vraiment, qu’est-ce qui est passé par ce trou de souris entre ces deux vies ?
J’ai dû laisser sur le pas de la porte quelques peurs : je suis plus calme, plus souriant (vraiment ?), plus chaleureux (je sers plus volontiers les gens dans mes bras). Mais il faut dire que j’ai choisi une voie où le but est de l’être, où le nerf de la guerre est la relation. Et j’ai presque l’impression d’être enfin à ma place, ou en tous cas sur de bons rails.
Je me sens en quelque sorte plus léger, atténué. Comme s’il y avait moins de bruits autour de moi. Comme si je faisais moins de bruits autour de moi. Comme s’il y avait autour de moi autant d’espace mais dégagé (un effet de la terre brûlée ?)
Et certains (voient-ils cet espace ?) me disent que c’est courageux. D’autres m’admirent.
Je ne suis pas courageux. Ce n’est pas admirable. C’est dans les capacité de chacun. La différence entre moi et quelqu’un d’autre est qu’au lieu de faire ci j’ai décidé de faire ça. Je n’ai pas inventé de temps supplémentaire, ni d’aptitude spéciale. J’ai utilisé ce que j’avais (temps, argent, neurones) pour marcher sur un autre chemin. Rien de courageux là dedans. Le pari n’est pas risqué : j’ai un parachute.
Alors pour l’instant je chope des noms au vol. Je laisse les gens venir à moi.
Alors pour l’instant j’explore cette réincarnation.
J’explore cet espace.